Réduire les coûts de santé avec les aliments : possible, en pratique ?
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Il est donc possible de réduire la survenue de différentes maladies avec une bonne hygiène de vie, même s’il n’y a pas de garantie au niveau individuel (voir article). Qu’est-ce qui nous empêche d’y parvenir ?
Des observations à la pratique
Certes, à partir de ces simples (si l’on peut dire) données, il n’est pas possible d’anticiper précisément les économies sur le système de soins, si tout le monde optimisait son comportement. Ceci à cause des interactions entre tous ces facteurs de risques, causes intriquées, qui sont complexes. Des études plus poussées seraient nécessaires pour les chiffrer exactement. Nul doute cependant qu’avec une amélioration de cette prévention, les gains seraient très substantiels, à côté des bénéfices pour chacun.
Comment faire ? Certains leviers semblent être assez simplement activables, alors qu’ailleurs il peut y avoir de fortes résistances.
Les clés d’un changement de comportement sont les connaissances, la motivation et éventuellement la dépendance à certains comportements. Ces 3 aspects peuvent être liés.
Connaissances
Ce que les gens ignorent
Par exemple, beaucoup de gens ne savent pas :
- qu’un régime favorable à la santé a été très souvent associé à une baisse marquée du risque du cancer du sein, de 20 à 60%. Et qu’une étude expérimentale avec une alimentation type méditerranéen a montré une diminution de 68%.
- Ou bien, que 75% au moins des maladies cardiovasculaires sont évitables avec une bonne hygiène de vie.
- Qu’adhérer au régime méditerranéen est associé à une diminution de l’atrophie cérébrale liée à l’âge, et à une diminution sensible du risque de la maladie d’Alzheimer.
A contrario,
- que la prise régulière et importante de boissons sucrées est associée à une augmentation du risque d’AVC et de maladies coronariennes de 15 à 20%.
Un manque de preuves ?
Alors certes, certains pourront arguer que les études étant souvent des observations, il n’y a pas d’absolue certitude sur les bénéfices à cause des biais possibles. Et que « de futures études sont nécessaires pour confirmer ces données ». Néanmoins, dans les cas ci-dessus, les études sont déjà nombreuses et convergentes, avec même des études expérimentales qui confirment ces effets, et d’autres qui éclairent sur les mécanismes d’action. La présomption d’efficacité est donc finalement très forte. Compte-tenu de l’importance des enjeux- gains majeurs de santé avec tout simplement de l’alimentation, il serait non-éthique de ne pas les promouvoir, ou au moins de ne pas diffuser largement ces observations telles qu’elles sont.
Débats et contradictions dans le monde scientifique
Il est vrai que d’une façon générale, des débats d’experts peuvent brouiller les messages vis-à-vis de la population. Des recommandations peuvent varier dans le temps ou faire débat à un moment donné. Du coup, difficile de s’y retrouver. Par exemple, on est passé d’un discours global « anti-gras » pour la prévention des maladies cardiovasculaires à un discours plus qualitatif sur les graisses à écarter et celles à privilégier, les connaissances progressant. Avec le temps, les études s’accumulent, les connaissances s’affinent et relativisent certains points, ou se confirment finalement.
Communication brouillée par des intérêts variés
Promoteurs d’idéologies variées, vendeurs de produits alimentaires ou de compléments divers encouragent parfois des produits déséquilibrés, sous-entendant même quelquefois des bénéfices santé. Tels ces produits végan riches en sucres, régimes gravement carencés en vitamines B12, produits sans gluten dépourvus de fibres, régime déséquilibré par ailleurs, ou encore croyance que les carottes favorisent le diabète… Ces discours et produits détournent leurs adeptes de la protection apportée par un bon équilibre alimentaire. En pratique, le contrôle des sources d’informations est essentiel. Les logos d’étiquetage nutritionnel validés sont éclairants pour les consommateurs.
Pour être pragmatique, il faudrait augmenter la diffusion des données sur les bénéfices des aliments de façon factuelle et précise, basées sur des faits médicaux et scientifiques, sans caractère d’injonction ni culpabilité, avec l’idée que quel que soit le niveau d’adhésion à un bon comportement, ce qui est pris est déjà bien.
La motivation ou l’envie
Au-delà du savoir, il faut de la motivation et de l’envie pour adopter de nouveaux comportements. Tout d’abord, être convaincu et se projeter dans ces bénéfices pour les mettre en pratique, et peut-être rompre avec une partie de ses habitudes. Le goût et le plaisir ne devraient pas être des barrières car l’alimentation méditerranéenne est très savoureuse, et l’équilibre alimentaire peut inclure des produits plus gourmands. Une amélioration peut être progressive, et si elle est partielle, ce qui est fait est déjà bien.
D’un autre côté, il peut y avoir un rejet à priori pour des recommandations de type hygiénistes, de la part d’adolescents qui traversent des périodes transgressives, ou d’adultes qui veulent « qu’on leur foute la paix », « qu’on leur laisse leur liberté ». L’information doit être factuelle et précise, sans injonction ni culpabilité encore une fois. Il faut parvenir à la fois à se faire plaisir et à garder un certain autocontrôle, sans malaise.
Dépendance, résistances
La dépendance est sans doute le facteur de résistance le plus fort. C’est un phénomène neurologique qui peut dépasser la volonté, comme avec le tabac. La dépendance à l’alimentation a été caractérisée. Certaines personnes n’arrivent pas à baisser leur consommation de sucres, de gras ou les deux, et en consomment trop, en dépit de leur volonté de baisser.
Pour lutter contre les dépendances, il faut réapprendre à se passer des excès de sucres et de gras ; parvenir à trouver son plaisir avec une alimentation différente ; éventuellement, avoir des sources de satisfactions compensatrices par ailleurs, ce qui n’est toujours facile. Le coût des produits influence aussi les comportements. Les taxes sur les boissons sucrées semblent diminuer les consommations, et le prix élevé des fruits et légumes est un frein à l’achat.
Le cas de l’obésité est particulier au sens où il est difficile de lutter contre une obésité ancienne, à fortiori s’il y a eu des tentatives successives d’amaigrissement. Lors d’un régime basses calories l’organisme s’adapte en diminuant les dépenses énergétiques de base et les gens ne parviennent donc pas à perdre du poids, malgré leurs efforts.
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Janvier 2018, mis à jour en Avril 2019 © Viviane de La Guéronnière