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La potabilité de l’eau de distribution publique

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Les niveaux-guides de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS)

La sécurité sanitaire de l’eau de boisson est établie selon des critères de potabilité. Ces critères sont, dans le monde, édictés par l’OMS sur la base d’expertises reposant sur les données scientifiques internationales. L’objectif est de limiter les risques de santé liés à la qualité de l’eau de boisson, protégeant la totalité d’une population y compris les plus fragiles, nouveaux nés, personnes fragiles et âgées. Ces « niveaux-guides » correspondent à une évaluation des risques pour un élément donné, liés par exemple à la gravité d’une contamination ou à l’exposition d’une grande partie de la population. Les différents pays adaptent ensuite ces niveaux-guides selon leur contexte local.

L’eau distribuée en France répond aux normes définies par l’Union Européenne, fondées sur les évaluations menées par l’OMS. Elle fait en outre l’objet de contrôles permanents.

Une référence pour les pays

Ces niveaux-guides de l’OMS servent ainsi de repères aux pays ou continents pour établir leurs limites réglementaires de qualité, en pratique les normes officielles. Pour définir les normes réglementaires, l’interprétation des niveaux-guides doit aussi tenir compte du contexte local concernant l’hygiène, l’assainissement, les éventuelles contaminations alimentaires, en développant une approche bénéfices risques. En effet si les ressources financières sont limitées, elles doivent être utilisées à bon escient au regard de l’impact des solutions mises en œuvre pour la santé publique.

Aucune approche donnée n’est universelle, ce qui fonctionne dans un pays ne fonctionnera pas nécessairement ailleurs. La détermination du niveau de sécurité, c’est-à-dire du risque acceptable, relève aussi du jugement de la société localement. Décider si le bénéfice de respecter un niveau-guide justifie son coût doit être déterminé au sein de chaque pays. Ceci étant, les niveaux-guides doivent être respectés autant que possible, car leur suivi s’accompagne de bénéfices santé à long terme.

Du captage de l’eau au consommateur

Une vision globale est nécessaire pour obtenir une bonne qualité de l’eau, partant du captage de l’eau jusqu’à la distribution au consommateur, envisageant des méthodes de contrôle efficaces et régulières. Le changement climatique avec des périodes de sécheresse et d’inondations doit être pris en considération. L’OMS considère les aspects microbiens, chimiques, de radioactivité et d’acceptabilité du produit (gout, odeur, apparence).

La prévention des risques microbiologiques

Les barrières à mettre en place contre les bactéries sont multiples, de la protection des ressources aux étapes de traitement jusqu’à la distribution. L’objectif prioritaire porte sur la prévention et la réduction de l’entrée de pathogènes dans les sources d’eau, plutôt qu’aux traitements visant à éliminer ces pathogènes. Les risques microbiologiques les plus importants sont généralement liés à des contaminations fécales humaines ou animales, y compris provenant d’oiseaux. Ces contaminations peuvent apporter des bactéries, virus, protozoaires et helminthes. On notera que la qualité microbienne de l’eau peut varier rapidement et sur une courte période de temps, augmentant considérablement un risque de survenue d’épidémie. Le temps qu’une contamination microbienne soit détectée, l’exposition humaine peut être déjà très importante, d’où l’importance de contrôles réguliers à priori. D’une façon générale, l’importance de la désinfection de l’eau est indiscutable et repose principalement sur le chlore, doit porter sur les eaux de surface et souterraines, exposées au risque de contamination fécale. Notons que la désinfection sera moins efficace vis-à-vis de protozoaires comme le cryptosporidium ou certains virus, ou si la turbidité est élevée, d’où la nécessité de traiter ces problèmes en amont et de protéger le stockage et la distribution de l’eau. La formation de sous-produits de désinfection ne doit pas compromettre leur utilisation, les bénéfices étant très supérieurs aux risques.

La prévention des risques chimiques

Les niveaux-guides sont établis pour les différents composants, permettant d’éviter un risque significatif de santé à l’échelle de la consommation d’une vie. Les contaminations aigües en produits chimiques par l’eau sont rares à l’exception de contaminations accidentelles. Elles rendent souvent l’eau indésirable à la suite de problèmes de goût, d’odeur ou d’apparence, d’où une certaine limitation des risques par rejet du produit. Ces contaminations doivent être traitées au coup par coup, leurs sources identifiées et corrigées.

La prévention en radioprotection (radionucléides)

On mesurera les activités radioactives globales alpha et béta de l’eau et identifiera les radionucléides en cause. L’évaluation des risques correspondants se fera en utilisant les données d’exposition générales à la radioactivité.

Aspects d’acceptabilité, goût, odeur et apparence.

Ces problèmes ne sont pas forcément associés à des risques santé, mais ils aboutiront à un rejet de l’eau par les consommateurs. Des changement d’apparence de l’eau de distribution en un lieu donné peuvent signaler un changement de qualité de la ressource ou un déficit de traitement et doivent être investigués.

Le calcul des niveaux-guides pour les risques chimiques

La limite de sécurité des contaminants de l’eau doit protéger les individus sur l’hypothèse d’une consommation tout au long de la vie. Elle doit aussi appliquer une marge de sécurité en cas d’incertitude. Elle tient compte de possibles volumes d’eau bus, donc in fine de la consommation probable. Les concentrations exceptionnelles, résultant par exemple d’une catastrophe industrielle, sont traitées séparément des normes classiques de potabilité. Idéalement, d’un point de vue technique, on aimerait pouvoir déduire la toxicité d’une substance sur la base de consommations humaines, mais ce n’est- heureusement- souvent pas possible, car d’une part de telles contaminations sont rares dans le réel (cela pourrait se produire par exemple dans le cas d’intoxications professionnelles), et d’autre part il est évident que les études expérimentales humaines ne sont pas concevables. On est donc amené à extrapoler des résultats expérimentaux d’études animales à l’homme, en associant des informations humaines si celles-ci sont disponibles.

En pratique, les niveaux-guides, Guideline values, représentent une concentration dans l’eau dépourvue de risque significatif pour la santé pour une consommation sur toute une vie.

L’agence Internationale de Recherche sur le cancer, l’IARC, détermine 5 groupes de substances :

  • Groupe 1 : agent carcinogène chez les humains
  • Groupe 2A : agent probablement carcinogène chez des humains
  • Groupe 2B : agent peut être carcinogène chez des humains
  • Groupe 3: agent ne pouvant pas être classé quant à sa cancérogénicité pour l’homme.
  • Groupe 4: agent probablement non cancérogène pour l’homme.

Cette classification est utilisée pour déterminer les niveaux-guides quand la substance en cause est classée.

Globalement pour chaque substance en cause, on détermine avec les données disponibles la dose maximum qui ne présente pas d’augmentation de risque, correspondant à une dose sure. Elle est exprimée par kilo de poids corporel et par jour. Par sécurité, on divise ensuite cette dose par un facteur d’incertitude (par exemple 10 ou 100 ou 1000 selon les cas) pour obtenir une consommation quotidienne tolérable (TDI).

Puis pour déterminer la quantité qu’une personne peut tolérer en pratique, on multiplie cette consommation quotidienne tolérable par le poids corporel des individus (PC), généralement fixé par convention à 60 kg.

Enfin on détermine la part de l’eau dans l’apport de la substance (P) ; par exemple, l’eau pourrait représenter 20% de l’apport quotidien ; et enfin la quantité d’eau bue chaque jour, fixée par convention à 2 L (Q).

Ainsi, le niveau-guide = (TDI x PC x P)/ Q.

Les effets des mélanges de substances et leurs potentiels effets additifs, le cas des substances pour lesquelles la dose sans effet est incertaine (absence de seuil) sont en outre traités en parallèle avec éventuellement un niveau-guide transitoire en l’absence de connaissances plus précises.

En France

Les exigences de qualité correspondant à chaque paramètre sont précisées par le Code de la santé publique, en application de la Directive européenne 2020/2184 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine. Elles sont notamment fondées sur les évaluations menées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour établir des niveaux-guides.

Les exigences de qualité sont classées en deux groupes :

  • des limites de qualité pour les paramètres dont la présence dans l’eau induit des risques immédiats ou à plus ou moins long terme pour la santé de la population. Ces limites de qualité concernent, d’une part, les paramètres microbiologiques et d’autre part, une trentaine de substances indésirables ou toxiques (nitrates, métaux, solvants chlorés, hydrocarbures aromatiques, pesticides, sous-produits de désinfection, etc.).
  • des références de qualité pour une vingtaine de paramètres indicateurs de qualité, témoins du fonctionnement des installations de production et de distribution. Ces substances, qui n’ont pas d’incidence directe sur la santé aux teneurs normalement présentes dans l’eau, peuvent mettre en évidence un dysfonctionnement des installations de traitement ou être à l’origine d’inconfort ou de désagrément pour le consommateur.

 

Viviane de La Guéronnière

Références

https://www.who.int/teams/environment-climate-change-and-health/water-sanitation-and-health/water-safety-and-quality/drinking-water-quality-guidelines

https://sante.gouv.fr/sante-et-environnement/eaux/article/eau-du-robinet

https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000465574/

https://solidarites-sante.gouv.fr/sante-et-environnement/eaux/article/le-controle-de-la-qualite-de-l-eau-du-robinet#

 

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